Archive : Bulletins 2005

Bulletin n°11/12 Novembre-Décembre 2005

  1. Pour votre information : A la suite d’un communiqué de l’Académie de Médecine du 15 décembre lui demandant d’informer (enfin) les vaccinateurs sur la stratégie à tenir à la suite de la disparition du Monovax®, la Direction Générale de la Santé (DGS) a précisé, dans un communiqué du 16 décembre, que la vaccination généralisée par le BCG devait être transitoirement maintenue avant l’entrée en collectivité, avec le BCG SSI® intradermique (http://www.sante.gouv.fr/). La raison essentielle à ce maintien transitoire d’une vaccination généralisée – avant le passage à une vaccination ciblée des groupes à risques, la décision de principe d’arrêter la vaccination généralisée ayant déjà été prise- est la nécessité de la mise en place d’un programme renforçant les moyens de dépistage et de prise en charge de la tuberculose en France.

Cette décision a soulevé un tollé de protestations de la part des vaccinateurs de terrain, soutenus par le Conseil National de Pédiatrie représentant l’ensemble de la communauté pédiatrique (http://www.sfpediatrie.com/upload/2/547/COM%20BCG%20long.pdf). Dans ce communiqué, les pédiatres :

  • s’opposent au maintien de la vaccination généralisée obligatoire avant l’entrée en collectivité ;
  • estiment que le changement de mode de vaccination par BCG intradermique pourrait rendre la balance « bénéfice / risque » défavorable pour la population sans facteur de risque ;
  • soulignent que cette décision risque de jeter le discrédit non seulement sur cette vaccination mais aussi sur l’ensemble des programmes de vaccination ;
  • insistent sur la nécessité de continuer et d’améliorer la vaccination des groupes à risque.

Les pédiatres assumant la majeure partie de la vaccination des nourrissons, un désordre important risque de s’installer si la DGS ne revient pas rapidement sur cette décision… A ceux qui auraient souhaité une prise de position d’InfoVac, rappelons que notre rôle n’est pas d’émettre des recommandations vaccinales – qui relèvent des autorités de santé – mais d’aider les médecins vaccinateurs à accomplir leur travail, en tenant compte des particularités des patients qu’ils suivent. Nous suivons donc cette situation complexe et vous tiendrons informés.

Malgré le peu de lisibilité des recommandations d’utilisation du Prevenar® en France, la couverture vaccinale a augmenté en 2005 : 97% des pédiatres de ville et 77% des médecins généralistes prescripteurs de vaccins pédiatriques prescrivent du Prevenar® (données Thales). Cependant :

  • l’âge moyen de la première prescription de Prevenar® est de 3,3 mois, alors qu’il est de 2,3 mois pour les vaccins pentavalents (données Thales),
  • seuls 49% des enfants sont correctement primo-vaccinés (Institut des Mamans),
  • parmi les enfants correctement primo-vaccinés dans leur première année de vie, seuls 60% d’entre eux ont reçu leur dose de rappel (Institut des Mamans) au cours de la 2e année.
  1. Disponibilité des vaccins : En dehors des problèmes posés par les vaccins anti-grippaux et la disparition définitive du Monovax®, les firmes ne nous signalent aucun problème d’approvisionnement.
  2. En réponse à vos questions : Combien d’injection(s) est (ou sont) nécessaire(s) chez l’adulte qui n’a pas eu de vaccin DTPolio depuis plus de 15 ans ? Il est admis que la protection d’un adulte ayant reçu dans l’enfance 5 doses de vaccin DTPolio persiste pendant au moins 25 ans, reposant sur l’induction de taux élevés d’anticorps et sur celle de cellules mémoire rapidement réactivées en cas d’exposition ou de rappel (sous réserve d’un rappel au moment d’une blessure, un tétanos n’a jamais été décrit après 5 doses de vaccin antitétanique). Par ailleurs, ayant évalué la réactogénicité d’un rappel dTpa chez l’adulte, le Comité consultatif canadien a rappelé récemment les risques de vaccination en cas d’hyperimmunisation antitétanique : fièvre, arthralgies, urticaire, céphalées, En pratique, si un adulte a reçu 5 doses de DTPolio ou DT CoqPolio il y a plus de 15 ans, il suffit d’une injection de Repevax® ou Boostrix®; sinon, deux doses espacées de 2 à 3 mois sont nécessaires.

Je croyais qu’une seule dose de vaccin conjugué contre les méningocoques serait suffisante… et j’ai vacciné beaucoup d’enfants entre 1 an et 16 ans. A qui devrais-je proposer une deuxième dose de vaccin ? La durée de l’immunité vaccinale augmente avec l’âge lors de la vaccination : elle est courte avant 1 an, dure quelques années entre 1 et 4 ans est prolongée lorsque la vaccination a lieu à l’adolescence (Trotter CL, Lancet 2004 ; 364(9431):365). Etant donné le 2e pic d’incidence des maladies à méningocoques entre 15 et 20 ans, une 2e dose de vaccin entre 11 et 15 ans réactive l’immunité des enfants vaccinés avant 5 ans. Les données manquent pour les enfants primovaccinés entre 6 et 10 ans, une deuxième dose semblant raisonnable pour une protection optimale…

Un antécédent de rectocolite hémorragique contre-indique-t-il la poursuite d’un calendrier vaccinal normal ? Des études récentes soulignent l’absence d’association entre les maladies inflammatoires chroniques du tube digestif et la vaccination par le ROR [Cochrane Database Syst Rev 2005 Oct19;(4):CD00440]. Une étude a retrouvé une association statistique entre le BCG et la maladie de Crohn, mais aucune association pour tout autre vaccin ou pour la RCUH [Baron Gut 2005 Mar;54:357]. L’Académie Américaine de Pédiatrie recommande de poursuivre le calendrier vaccinal normal – à l’exception des vaccins vivants en cas de traitement immunosuppresseur.

Ce dernier bulletin de l’année 2005 est l’occasion de vous remercier de votre confiance, dont témoigne le nombre toujours croissant d’inscriptions (plus de 3000) à InfoVac-France…

Avec tous nos voeux pour 2006,

Robert Cohen, Pierre Bégué, Philippe Reinert, François Vié le Sage, Marie-Aliette Dommergues, Nicole Guérin, Pascal Besse, Véronique Dufour, Daniel Floret, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Isabelle Hau, Olivier Romain, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°10 Octobre 2005

  1. Pour votre information : La découverte récente de virus H5N1 chez des oiseaux dans différents pays européens accentue la perception de la menace de grippe aviaire dans la population et génère de nombreuses Dans la crainte d’une contamination par un virus potentiellement mortel, la demande d’une vaccination contre la grippe se fait de plus en plus fréquente. Cette demande pourrait dépasser le nombre de doses disponibles pour la vaccination des personnes à risques élevés de complication, augmentant ainsi le nombre de décès dus à la grippe saisonnière ! A l’exception des personnes en contact professionnel avec des oiseaux (si la grippe aviaire arrivait en France…), ces groupes à risques sont les mêmes qu’au cours des années précédentes.

La vaccination contre la grippe ne protège pas contre la grippe aviaire. Le vaccin de la saison 2005-2006 contient les 3 souches virales H1N1, H3N2 et B considérées en février 2005 comme étant les plus susceptibles de circuler pendant la saison d’hiver 2005-2006. Ces vaccins sont efficaces contre ces 3 souches mais les défenses immunitaires qu’ils déclenchent ne protègent pas contre la souche H5N1 qui affecte actuellement les volailles.

La vaccination contre la grippe n’est recommandée, dans les régions où sévit la grippe aviaire, que pour éviter le risque (faible) d’une co-infection temporelle. La grippe aviaire est très dangereuse pour les oiseaux mais très peu contagieuse pour l’homme : seules 118 personnes en contact étroit avec des volailles ont été infectées à travers le monde. La crainte est que le virus H5N1 de la grippe aviaire puisse se combiner avec un virus de la grippe humaine (comme H1N1 ou H3N2) et donner alors naissance à un nouveau virus qui serait très contagieux et dangereux pour l’humain (virus pandémique). Ce nouveau virus pourrait apparaître si une personne était infectée en même temps (la même semaine…) par les virus de la grippe aviaire et de la grippe saisonnière. Le but de la vaccination contre la grippe saisonnière dans les régions touchées par la grippe aviaire est donc seulement de diminuer le risque de cette double infection concomitante.

La vaccination contre la grippe doit être réservée aux personnes à risques élevés de complications de cette affection qui sont :

  • les personnes âgées de plus de 65 ans ;
  • les adultes et enfants exposés à des risques accrus de complications en raison de maladies graves (maladies cardiaques ou pulmonaires chroniques, asthme bronchique, malformations cardiaques congénitales, mucoviscidose, troubles métaboliques chroniques (notamment le diabète), insuffisance rénale, hémoglobinopathie ou immunosuppression) ;
  • les adultes et enfants qui requièrent un suivi médical régulier et qui ont été hospitalisés au cours de l’année précédente.

La vaccination contre la grippe est également recommandée aux catégories suivantes :

  • les résidents de homes et maisons de retraite, les pensionnaires d’institutions pour maladies chroniques ;
  • les personnes qui peuvent transmettre le virus de la grippe à des personnes à risques (personnel médical et soignant ainsi que toute personne en contact direct avec les patients et/ou résidents des hôpitaux et cliniques, des cabinets médicaux, des services de soins à domicile, des homes pour personnes âgées, des établissements de soins ou de cure) ;
  • les personnes qui sont en contact proche avec des personnes à risques (enfants y compris).

L’augmentation de la capacité de production des vaccins contre la grippe saisonnière devrait faire partie de la réflexion sur la préparation « pandémie ». Des initiatives pour encourager une extension intelligente et utile de la vaccination sont à envisager, tout particulièrement dans l’environnement que nous connaissons aujourd’hui.

Le CDC viens de publier l’impact de l’implantation du Prevenar® depuis 4 ans sur les infections invasives aux Etats- Unis (MMWR Weekly Volume 54, No. 36 September 16, 2005). Si une augmentation modérée du nombre d’infections dues aux sérotypes non vaccinaux a été observée (+4.721/an), la réduction du nombres de cas dus à des sérotypes vaccinaux (- 29.599/an) ainsi que du nombre global d’infections à pneumocoque (-24.878/an) sont remarquables. Grace à l’effet indirect du vaccin, la réduction en nombre total de cas est encore plus importante parmi la population non vaccinée (-20.459/an) que dans la population vaccinée (-9140/an).

Deux vaccins destinés à la protection des adultes contre la Diphtérie (d), Tétanos, Polio et Coqueluche (acellulaire) sont maintenant disponibles : le Boostrix® et le Repevax®.

  1. Disponibilité des vaccins : Le Pentacoq® et le Monovax® devraient disparaître début 2006. En dehors des problèmes prévisibles pour les vaccins anti-grippaux, les firmes ne nous signalent pas problème.
  2. En réponse à vos questions : Quel est le délai à respecter entre l’injection de gamma anti D à une femme en suite de couches et le vaccin anti-rubéole : 4 semaines ou injection possible immédiatement ? Les immunoglobulines (quelle que soit leur spécificité) viennent d’un « pool » d’immunoglobulines, y compris celles susceptibles de neutraliser les vaccins vivants. La recommandation est d’attendre 3-5 mois, et elle est justifiée parce qu’une fausse sécurité (risque d’inefficacité du vaccin) n’est pas souhaitable dans ce contexte.

Une myasthénie est-elle une contre-indication aux vaccinations, notamment celle contre la grippe ?

La myasthénie rentre dans le cadre des maladies auto-immunes. La revue de la littérature médicale n’identifie aucune évidence que cette maladie puisse être déclenchée ou exacerbée par une vaccination. Les précautions sont d’être à distance d’une poussée et de tenir compte d’éventuels traitements immunosuppresseurs.

Robert Cohen, François Vié le Sage, Nicole Guérin, Pierre Bégué, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Daniel Floret, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°9 Infovac-France Septembre 2005

  1. Pour votre information : La suspension d’AMM de l’Hexavac® par l’Agence Européenne pour l’Evaluation des Médicaments (http://afssaps.sante.fr/htm/10/filcoprs/indcompr.htm) motive les mises au point suivantes :
    • La vaccination par Hexavac® protège efficacement contre le tétanos, la diphtérie, la coqueluche, la poliomyélite et les infections à influenzae b. Mais certains enfants pourraient ne pas bénéficier d’une protection contre l’hépatite B pendant leur vie d’adolescent et d’adulte. La tolérance du vaccin n’est pas en cause !
    • Infanrix Hexa® n’est pas touché par cette mesure de suspension ! Aucun doute n’a été soulevé sur sa capacité à induire des anticorps persistants de façon prolongée et une bonne mémoire immunitaire.
    • Il n’y a actuellement en France aucune recommandation de faire un rappel supplémentaire contre l’hépatite B chez les enfants (environ 60 à 000 nourrissons) vaccinés par Hexavac® entre 2003 et 2005. Si une dose de rappel était jugée nécessaire (un groupe d’experts le déterminera dans les prochaines semaines), elle serait sans doute recommandée vers l’âge de 5 à 6 ans. Aucune mesure immédiate n’est donc nécessaire !
    • Le dosage systématique des anticorps anti-HBs chez les enfants vaccinés par l’Hexavac® est inutile. En effet, un dosage des anticorps contre l’hépatite B plusieurs années après la dernière dose de vaccin ne permet pas de déterminer de façon fiable si la vaccination a induit – ou non – une protection à long terme. Petit rappel : La protection à long terme contre l’hépatite B repose sur l’induction de l’immunité mémoire, qui semble particulièrement efficace lorsque des taux élevés d’anticorps (anti-HBs >100 UI/l) sont atteints un mois après la dernière dose de vaccin. Les anticorps baissent ensuite progressivement, mais la protection persiste parce que la mémoire immunitaire peut se réactiver rapidement si nécessaire. Il est certes possible de doser les anticorps contre l’hépatite B (anti-HBs) dans le sang, même longtemps après la dernière dose de Un taux >10 UI/l suffit à la protection à court terme. Si les anticorps sont

>100 UI/l, la protection est assurée à long terme. Mais un taux d’anticorps <100 ui= » » l= » » ne= » » permet= » » pas= » » de= » » d= » » terminer= » » si= » » ce= » » taux= » » a= » » t= » » atteint= » » ou= » » non= » » -= » » un= » » mois= » » apr= » » s= » » la= » » derni= » » re= » » dose= » » p= » »>

  • Ni les études qui ont entraîné la suspension de l’Hexavac®, ni celles qui ont conduit au maintien de l’Infanrix Hexa® ne sont, à notre connaissance, pas encore publiées… ce qui est logique car les firmes doivent déposer auprès des autorités de santé les résultats de leurs études bien avant qu’elles n’aient eu le temps d’être acceptées et finalement publiées dans un journal international à comité de lecture.
  1. Disponibilité des vaccins : Les firmes ne nous signalent aucun problème d’approvisionnement.
  2. En réponse à vos questions sur la vaccination contre la grippe :Faut-il vacciner tous les enfants contre la grippe ? Il n’y a pas encore assez de données d’efficacité / de sécurité vaccinale pour justifier une recommandation de vaccination généralisée. Par contre, il n’y a aucune raison de ne pas mieux vacciner les enfants ayant des facteurs de risques ! Rappelons qu’en France :
    • les populations à vacciner prioritairement comportent outre les personnes âgées et le professionnels en contact avec des sujets à risque, les patients présentant une pathologie sous-jacente : affections broncho-pulmonaires chroniques (dont asthme, dysplasie broncho-pulmonaire, mucoviscidose), drépanocytose, cardiopathies congénitales mal tolérées, syndrome néphrotique, diabète, déficit immunitaire cellulaire .
    • le taux de couverture dans ces populations (notamment le personnel médical et paramédical ainsi que les sujets présentant une pathologie sous jacente) est notoirement insuffisant.

En raison du risque (hypothétique) d’épidémie de grippe aviaire, y a-t-il lieu de généraliser une vaccination anti- grippale « classique » pour cet hiver ? En cas d’épidémie, si un enfant présente un syndrome grippal et s’il est vacciné, le diagnostic différentiel pourrait-il être facilité ? Il est considéré comme improbable qu’une infection par un virus H5N1 mutant capable de générer une pandémie (donc par définition échappant à l’immunité anti-influenza existante dans la population !) puisse être prévenue par une vaccination contre les souches H1N1, H3N2 ou B. La notion d’une vaccination grippale antérieure ne modifiera pas non plus l’attitude (traitement par inhibiteur de neuraminidase) en cas d’exposition possible ou probable à un virus aviaire. La prévention de symptômes grippaux pourrait cependant avoir un intérêt dans une période pré-pandémique, en particulier pour les voyageurs susceptibles d’être affectés par des mesures de restriction de déplacement en cas de fièvre !

Pour la vaccination des enfants : quand faut-il donner une demi-dose et quand faut-il en donner deux ? Les enfants de 6 à 36 mois ne reçoivent qu’une demi-dose (0.25ml) de vaccin, pour qu’il soit bien toléré. Comme la vaccination contre la grippe demande une stimulation plus intense chez ceux non précédemment exposés à la grippe, 2 injections sont nécessaires pour la première vaccination des enfants de moins de 8 ans n’ayant pas été infectés ou vaccinés auparavant (ce qui est rare entre 3 et 8 ans). En pratique : 2 demi-doses la première année, une demi-dose les années suivantes avant 3 ans, une seule dose entière dès l’âge de 36 mois !

Avec quels vaccins les vaccins contre la grippe sont-ils compatibles ? Avec tous, sans restriction !

Quelles dates conseillez-vous cette année pour la vaccination ? La prédiction précise d’une épidémie de grippe est une science inexacte ! L’épidémie pouvant atteindre son pic en décembre, la vaccination devrait avoir été terminée mi- novembre. L’épidémie peut cependant ne se déployer qu’en mars, moment où la protection vaccinale (le taux des anticorps) aura déjà diminué si la vaccination a été trop précoce… La période de mi-octobre à mi-novembre est donc un bon compromis pour la vaccination.

Robert Cohen, Jean Marc Garnier, Pierre Bégué, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergue, Véronique Dufour, Daniel Floret, Joël Gaudelus Emmanuel Grimprel Nicole Guérin, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°8 Août 2005

  1. Pour votre information : En primeur, les résultats de l’enquête sur la perception de la vaccination varicelle !

En réponse à l’enquête initiée par l’InVS, INFOVAC, ACTIV, le GROG et l’AFPA auprès d’environ 5000 médecins, 884 questionnaires ont été remplis dont 85% par des médecins abonnés à Infovac et 21% par des membres des GROG. Globalement, les répondants étaient pour 62% des pédiatres et pour 37% des médecins généralistes. 91% des participants proposent systématiquement la vaccination ROR entre 1 et 2 ans, 5% parfois, 4% jamais. Si le vaccin RORV était inscrit dans le calendrier vaccinal et donc remboursé, il serait proposé systématiquement (70%), parfois (19%) ou jamais (11%). Sans remboursement, il serait proposé systématiquement (32%)parfois (44%) ou jamais (24%).

55% des médecins pensent que plus des ¾ des familles qui acceptent le ROR actuellement opteraient pour le RORV s’il était inscrit dans le calendrier vaccinal, contre 21 % dans le cas contraire. Enfin, 80% des médecins pensent que les familles qui n’acceptent pas le ROR aujourd’hui n’accepteraient pas ou de manière exceptionnelle la vaccination contre la varicelle ! Malgré ses limites, cette étude sera utile dans le cadre des réflexions en cours concernant une éventuelle intégration de cette vaccination dans le calendrier vaccinal français. D. Levy-Bruhl, InVS

Dans le paysage vaccinal français, 4 événements viennent compliquer la tache globale de prévention vaccinale :

  • La disparition du service militaire, et avec lui la disparition de la « mise à jour vaccinale » de cohortes successives de jeunes hommes adultes.
  • La suppression du Monotest® (circulaire du 11 octobre 2004) et la disparition prochaine du Monovax®.
  • Par conséquence, la nécessité de la voie ID pour les vaccins et les tests
  • La nouvelle recommandation de rappel coqueluche chez l’adulte

Ces éléments posent des problèmes opérationnels quotidiens qui invitent à recenser toutes les personnes aptes à promouvoir et/ou pratiquer les vaccins. En dehors de la médecine scolaire et des PMI, cela inclut :

  • les infirmières libérales qui, sous couvert d’une prescription correcte (par exemple : Tubertest + seringue I ml + Aiguille ID), peuvent pratiquer les IDR en ambulatoire;
  • les centres de prévention du CDHS (Comité Départemental d’Hygiène Sociale) qui existent dans tous les départements : des patients pourraient leur être adressés pour les vaccinations BCG ou les IDR;
  • les sages femmes, puisque la liste des vaccins qu’elles peuvent effectuer vient de s’allonger : aux jeunes mamans (contre la rubéole) et aux nouveau-nés (contre l’hépatite B) s’ajoutent désormais la vaccination des nourrissons contre la tuberculose et des femmes contre tétanos diphtérie, poliomyélite, coqueluche, hépatite B, grippe. Le but étant d’induire une immunité avant la prochaine grossesse ! décret paru au JO n°78 du 3 avril 2005 http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=SANP0521016A
  • les Gynéco Obstétriciens et Gastro-entérologues (hépatite B !) ont aussi une mission de prévention.
  1. Disponibilité des vaccins : Les firmes ne nous signalent aucun problème d’approvisionnement. Rappelons que le DTP® est de nouveau disponible, mais en quantité limitée.
  2. En réponse à vos questions : Je suis en consultation un enfant de 2 mois chez lequel a été diagnostiquée une encéphalopathie dégénérative (maladie de Menkès). La vaccination contre la coqueluche est-elle contre-indiquée ? La maladie de Menkès est une dégénérescence neuronale progressive évolutive, récessive liée à l’X, due à des mutations de l’ATPase participant au transport du cuivre au niveau du système nerveux central. Les traitements disponibles ne permettent malheureusement pas d’empêcher la progression de la dégénérescence neuronale, l’atrophie cérébrale et les troubles de myélinisation étant responsables de symptômes neurologiques sévères (Munakata, Brain Dev. 2005 ;27(4):297- 300, Liu, Mol Genet Metab. 2005;85(4):291-300). Les encéphalopathies chroniques évolutives figurent dans le Vidal parmi les contre-indications aux vaccins pentavalents, y compris les vaccins avec composante coqueluche acellulaire. Cela impliquerait de devoir renoncer à la vaccination coqueluche et d’utiliser un vaccin DTPolio (à nouveau disponible) associé (4 injections séparées !) à un vaccin monovalent contre Hib. Cependant, les contre-indications des vaccins coqueluche acellulaire ont été révisées lors de l’Autorisation de Mise sur le Marché, plus récente, des vaccins hexavalents : la seule contre-indication retenue est celle d’une « encéphalopathie d’étiologie inconnue, survenue dans les 7 jours suivant une vaccination antérieure par un vaccin contenant la valence coquelucheuse ». Dans le contexte actuel de recrudescence de la coqueluche, dont le décours pourrait être encore compliqué par une maladie neurologique sous-jacente, il faut proposer une vaccination contre la coqueluche, par les vaccins coquelucheux acellulaires.

À la suite d’une première injection de Prevenar®, un nourrisson de 3 mois a présenté une rougeur diffuse de tout le corps, associée à des cris. Peut-on continuer les injections de Prevenar® et débuter les autres vaccins (qui n’avaient pas été faits la première fois) ? Cette description évoque une réaction vasovagale accompagnée d’une réaction vasomotrice : apparition immédiate, vasodilatation responsable de la rougeur… sans la moindre suspicion de réaction allergique (urticaire, bronchospasme, etc.). Il s’agit peut-être d’une variante généralisée du « discolored legs syndrom » survenant au décours immédiat d’une injection intramusculaire, le plus souvent un vaccin. Le membre inférieur (parfois les 2 !) prend une couleur pourpre pendant quelques heures (< 24h). Parfois, plus rarement, la couleur est bleutée et dure généralement < 1h. Dans la variante « rouge », la coloration est souvent suivie de l’apparition de pétéchies, plus tard ou le lendemain. Parfois, on ne note que les pétéchies sans changement de couleur préalable. L’hypothèse est que ces pétéchies représentent une extravasation sanguine secondaire à la stase vasculaire. Cette réaction est peut-être liée à la traversée d’une artériole par l’injection intramusculaire (même s’il n’y avait pas de sang dans l’aiguille avant l’injection). Cet effet indésirable devrait être déclaré, mais il permet de poursuivre les vaccinations selon le calendrier habituel.

Pascal Besse, Olivier Romain, Pierre Bégué, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Daniel Floret, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Nicole Guérin, Isabelle Hau, Philippe Reinert, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Robert Cohen, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°7 Infovac-France – Juillet 2005

  1. Pour votre information : Le nouveau calendrier vaccinal est disponible dans le BEH 29-30 du 5 Juillet 2005. (http://www.invs.sante.fr/beh/2005/29_30/beh_29_30_2005.pdf). Trois nouvelles recommandations apparaissent : la vaccination contre la rage des sujets au contact des chauves-souris (chiroptérologues), l’extension à tous les adultes du rappel de vaccination contre la diphtérie tous les 10 ans (avec la composante « d »à dose réduite d’anatoxine diphtérique) et surtout des modifications importantes de la stratégie vaccinale contre la rougeole :
    • Pour les nourrissons :
      • La première dose de vaccin trivalent ROR est recommandée à 12 mois (et non plus à partir de 12 mois) et la

deuxième dose entre 13 et 24 mois (intervalle d’au moins un mois entre les deux injections).

  • La première dose vaccin trivalent ROR est recommandée à l’âge de 9 mois et la deuxième dose entre 12 et 15 mois pour ceux qui entrent en collectivité avant 12 moisUne 3e dose n’est plus nécessaire.
  • Pour les enfants de 2 à 13 ans non vaccinés : deux doses de vaccin ROR trivalent sont recommandées.
  • Pour les sujets de 14 à 25 ans non vaccinés : une dose de vaccin ROR trivalent est recommandée.
  • Les personnes de plus de 25 ans non vaccinées, sans antécédents de rougeole (ou dont l’histoire est douteuse), dont la sérologie est négative et qui exercent les professions de santé (en formation, à l’embauche ou en poste, en priorité dans les services accueillant des sujets à risque de rougeole) doivent recevoir une dose de vaccin trivalent.
  • En cas de contage ou de cas groupés, des recommandations de vaccination spécifiques ont été émises pour les nourrissons de 6-9 mois et les sujets de plus de 25 ans.

L’Académie de Médecine a récemment pris position (28 Juin 2005) sur l’avenir de la vaccination par le BCG (www.academie-medecine.fr/actualites/avis.asp) en concluant que la suppression totale de la vaccination ne parait pas possible à ce jour, que la vaccination ciblée des enfants à risque est une orientation possible mais dont l’application est difficile et que toute modification de la politique vaccinale implique la refonte du plan de lutte antituberculeuse en France (amélioration du dépistage des cas contacts et de leur traitement).

La remise en cause de la vaccination systématique par le BCG n’est pas limitée à la France. Le ministère de la santé britannique a annoncé le 7 Juillet la fin de la vaccination universelle par le BCG, la stratégie adoptée étant de cibler les groupes à risques : nouveau-nés vivant dans des régions où l’incidence de la tuberculose est supérieure à 40 cas pour 100.000 habitants, nourrissons dont les parents ou les grands-parents sont originaires d’un pays avec des taux similaires, et migrants non vaccinés en provenance de pays endémiques.

Au Canada, la vaccination BCG est déjà limitée aux groupes à risques (en particulier les esquimaux) et pourrait le devenir encore d’avantage. En effet, Deeks et col. rapportent 21 complications graves secondaires à la vaccination par le BCG au cours des 15 dernières années (Réseau Impact) : 6 BCGites généralisées (dont cinq mortelles) chez des enfants atteints de déficit immunitaire sévère non diagnostiqué avant la vaccination, 2 ostéomyélites, des suppurations locales et des lymphadénites (Pediatr Infect Dis J 2005 ;24 :538).

Une imprécision s’était glissée dans le bulletin de Juin 2005, signalée par le Docteur Catherine Goujon du Centre de Vaccination de l’Institut Pasteur : si la vaccination antirabique post exposition (contact avec un animal enragé ou suspect) est réservée aux centres antirabiques, le vaccin est disponible en pharmacie et peut être administré à un voyageur avant son départ directement par son médecin traitant.

Vous avez été nombreux (>800) à répondre à l’enquête sur la vaccination des nourrissons contre la varicelle.

Premiers résultats dans le prochain bulletin Infovac ! Les résultats complets de l’enquête BCG seront publiés dans un des prochains numéros des Archives de Pédiatrie !

  1. Disponibilité des vaccins : Les firmes ne nous signalent aucun problème d’approvisionnement. Rappelons que le DTP® est de nouveau disponible, mais en quantité limitée, ne permettant pas de couvrir la demande de l’ensemble des indications antérieures. Il doit donc être réservé :
    • en priorité pour les enfants de moins de 6 ans présentant une CI au vaccin coquelucheux (exceptionnelle…), ou pour ceux dont les parents n’acceptent que les vaccins « obligatoires » ;
    • pour la vaccination de rappel de l’enfant âgé de 6 ans. L’AMM conditionnelle du vaccin REVAXIS® pour le rappel des enfants à partir de 6 ans reste valide.
  2. En réponse à vos questions :

La vaccination Rougeole-Oreillons-Rubéole est elle contre-indiquée chez un enfant de 13 mois dont le diagnostic d’allergie à l’œuf a été porté par un allergologue-pédiatre ? Non. Il est désormais officiel en France (comme ailleurs) que l’allergie à l’œuf ne constitue plus une contre-indication à la vaccination ROR, mais une simple « précaution d’emploi ». Les précautions que l’on peut proposer sont de vacciner ces enfants le matin, de les garder plus longtemps au cabinet (>1 heure), éventuellement administrer un antihistaminique par voie orale 1-2 heures avant l’injection et bien entendu d’avoir de l’adrénaline à portée de la main. Rappelons que l’allergie à l’œuf reste une contre- indication à la vaccination contre la grippe ou la fièvre jaune, ces vaccins étant produits sur œufs embryonnés et non sur fibroblastes de poulet, comme le vaccin ROR.

Robert Cohen, Nicole Guérin, Daniel Floret, Pierre Bégué, Véronique Dufour, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergues, Joël Gaudelus, Jean Marc Garnier, Emmanuel Grimprel, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°6 Juin 2005

  1. Pour votre information : Les vacances approchant, de très nombreuses questions arrivent à Infovac concernant les vaccinations du voyageur. Quelques règles simples méritent d’être rappelées :
    • Rappeler les mesures d’hygiène alimentaire de base (http://www.pasteur.fr/sante/cmed/voy/frame- html#hygiene)
    • Penser que les séjours ailleurs que sous les tropiques sont aussi des indications à des vaccins du voyageur : ainsi, le vaccin contre l’hépatite A est indiqué pour la majorité des pays du pourtour méditerranéen et de l’Europe de l’Est. Le vaccin contre l’encéphalite à tique est recommandé pour toutes les personnes prévoyant d’effectuer un séjour en Europe centrale en zone rurale, au printemps et en été.
    • Profiter de l’occasion pour mettre à jour les vaccins de base (DTPolioCoq, ROR, Hépatite B, Hi b…), encore plus nécessaires dans les pays en voie de développement (immunité de groupe variable).
    • Administrer les vaccins viraux vivants (fièvre jaune, ROR, varicelle) le même jour ou à un intervalle d’un mois

entre les injections, les autres vaccins n’imposent aucun délai particulier (jours, semaines).

Le vaccin Engerix B20® (comme le Genhevac B®) vient d’obtenir une AMM pour la vaccination de l’adolescent (11 à 15 ans) en deux doses (à ≥ 6 mois d’intervalle) contre l’hépatite B.

La discussion sur le diamètre et la longueur des aiguilles utilisées pour les injections vaccinales intra-musculaires a été relancée récemment par la présentation de Diggle (ESPID 2005, Valence; abstract 47). Cette étude comprenant 696 nourrissons a comparé la tolérance et l’immunogénicité d’un vaccin DTCacPolio-HiB effectué avec l’une de 3 aiguilles : 23G/L25 mm, Ǿ25G/L16 ou 25 mm. Résultats :

  • les réactions locales (induration, rougeur, oedème) ont été moindres avec les aiguilles longues (p : 0,0001) et les rares réactions importantes n’ont été observées qu’avec les aiguilles courtes ;
  • pour ce qui est de l’immunogénicité, un taux plus élevé d’anticorps a été noté pour les valences Diphtérie et Meningo C avec les aiguilles longues de 25 mm.

Les auteurs concluent que le diamètre de l’aiguille n’intervient pas, même pour la douleur ; quant à la longueur, une aiguille longue (de 25 mm) n’a que des avantages, tant pour la tolérance que pour l’immunogénicité.

La disparition du Monovax® inquiète le praticien français pour qui l’injection intradermique n’est pas une technique simple, surtout chez le nouveau-né. Orwa (ESPID 2005, Valence, Abstract 396) a rapporté l’incidence des effets indésirables après BCG-ID® (souche de Mycobacterium bovis danoise 1331, la même que celle présente dans le BCG-SSI®) utilisée en Irlande depuis 2002 : une augmentation franche des notifications a été observée entre 2002 et 2004. Pour 85 000 vaccinations, 121 effets indésirables ont été rapportés soit 0,14% : 59 adénites, 58 réactions locales > 10 mm de diamètre et 4 rashs généralisés ; 21 exérèses chirurgicales ont été effectuées. Les auteurs estiment que cette augmentation d’incidents peut être due à une mauvaise maîtrise de la technique mais aussi à cette nouvelle souche vaccinale.

Vous avez déjà été nombreux (>500) à répondre à l’enquête sur la vaccination des nourrissons contre la varicelle. Pour ceux qui n’ont pas répondu, vous avez encore quelques jours pour le faire http://www.activ.asso.fr/RORV

  1. Disponibilité des vaccins : Le DTP® est de nouveau disponible, mais en quantité limitée ne permettant pas d’envisager de couvrir la demande de l’ensemble des indications antérieures. Il doit donc être réservé :
    • en priorité pour les enfants de moins de 6 ans présentant une CI (exceptionnelle…) au vaccin coquelucheux, ou pour ceux dont les parents n’acceptent que les vaccins « obligatoires » ;
    • pour la vaccination de rappel de l’enfant âgé de 6 ans. L’AMM conditionnelle du vaccin REVAXIS® pour le rappel des enfants à partir de 6 ans reste valide.
  2. En réponse à vos questions : Une jeune fille de 13 ans présentant une polyarthrite rhumatoïde est depuis quelques mois sous Remicade®. Elle n’a pas de nouvelle poussée et parait stable depuis quelques mois. Du fait de sa maladie, elle est très en retard pour le rappel DTPCoq ac et le deuxième ROR. Peut-on la vacciner maintenant ? Pour les patients sous anti-TNF (Remicade®, Infliximab®), il n’y a pas de danger particulier à utiliser les vaccins inactivés, mais la réponse immune risque d’être plus faible (comme ceci a été montré pour le vaccin pneumococcique polysaccharidique (Elkayam Semin Arthritis Rheum. 2004 Feb;33(4):283). Un dosage des anticorps anti-tétanique et anti- diphtérique serait utile (dans un délai d’un mois) pour juger de la nécessité éventuelle de doses supplémentaires. Pour le ROR, doser les anticorps anti-rougeole, rubéole et oreillons ; s’ils sont positifs aucune prévention supplémentaire n’est nécessaire, dans le cas contraire aucun vaccin vivant n’a été testé dans ces circonstances et en cas de contage, il faut proposer d’autres alternatives préventives (immunoglobulines). D’où l’intérêt de vacciner ces patients avant la mise en route du traitement.

Robert Cohen, Philippe Reinert, Olivier Romain, Pierre Bégué, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Daniel Floret, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Nicole Guérin, Isabelle Hau, François Vié Le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°5 Mai 2005

  1. Pour votre information :

Vous avez été nombreux (869, soit 643 pédiatres et 191 généralistes) à répondre à l’enquête BCG réalisée du 19 au 30 avril dernier par Infovac-France, l’INVS et l’AFPA. Il est intéressant de noter que hormis pour deux items (nombre de BCG réalisés et souhait d’une formation à la pratique des intradermo-réactions), les pédiatres et les généralistes partagent les mêmes avis. Les résultats complets de cette enquête seront prochainement publiés. Infovac-France vous livre en avant-première quelques informations :

  • la majorité des vaccinateurs ne pratique pas de Tubertest® pré- BCG avant l’âge de 6 mois ;
  • le Monovax® est la forme de BCG le plus souvent utilisée, >93% des réponses ;
  • l’option préférée (près des 2/3) après la disparition du Monovax® : ne vacciner que les patients à risque ;
  • plus de 60% pensent que les parents pourraient s’opposer à la vaccination par voie intradermique;
  • plus des 2/3 des praticiens ne peuvent compter sur une aide (en dehors des parents) pour la contention des enfants pendant l’intradermoréaction ;
  • il ne paraît pas acceptable pour 2/3 des médecins, d’adresser leurs patients à des confrères ou à des structures spécialisées.

Nous espérons que ces informations aideront les autorités responsables à prendre les décisions attendues. Infovac vous proposera prochainement d’autres enquêtes sur des sujets d’actualité vaccinologique.

EMLA® et injection intradermique : La disparition déjà effective du MonotestÒ et celle programmée du MonovaxÒ vont conduire les vaccinateurs à pratiquer de plus en plus souvent des IDR à la tuberculine (Tubertest®) et des BCG intra dermiques (BCG SSI®), que la vaccination soit généralisée ou réservée à des groupes à risque. Outre les difficultés techniques et la nécessité d’immobiliser l’enfant, ces vaccins sont douloureux et il est tentant d’espérer faciliter une injection ID en proposant un patch d’EMLA® (lidocaine–prilocaine). Or l’EMLA® comporte des inconvénients notoires devant décourager son utilisation dans ces indications :

  • Pour le BCG SSI®, il s’agit d’une contre-indication répertoriée dans les RCP du vaccin et de l’analgésique : les anesthésiques locaux ayant un effet bactériostatique, ils présentent un risque théorique d’inactivation de ce vaccin vivant. Même si, en 1998, dans une étude ouverte et non randomisée regroupant 388 enfants de 2 semaines à 11 ans, Dohlwitz n’a pas objectivé de différence dans l’induction de la positivité des IDR après BCG dans le groupe EMLAÒ (n = 269) contre le groupe contrôle (n= 119) [Dohlwitz A. Acta Paediatr. 1998;87(4):480-1].
  • Pour le Tubertest®, la réalisation et l’interprétation doivent être particulièrement soignées puisque le diagnostic de

primo-infection tuberculeuse repose en grande partie sur le diamètre d’induration obtenue par le test. Or une étude récente chez des adultes montre qu’il peut y avoir plus de 6 mm d’écart entre deux IDR si Emla® est utilisé [Dubus JC. European Respiratory Society, Vienne 2003. European Respiratory Journal. Abstract]

  1. Disponibilité des vaccins : Les difficultés d’approvisionnement résolues pour le Pentacoq® et le Monovax®.
  2. En réponse à vos questions : Est-ce qu’un enfant ayant fait une coqueluche est protégé à vie ? De façon générale, quelles sont les maladies qui entraînent une immunité suffisante pour ne plus nécessiter une vaccination? On a pu croire que la coqueluche conférait une immunité définitive tant que l’intense circulation du germe permettait des contacts répétés réalisant des rappels naturels. Maintenant que ces contacts sont devenus rares, la maladie immunise pour quelques années. Le maintien de l’immunité, qu’elle soit post-infectieuse ou post-vaccinale, repose essentiellement sur la persistance de taux d’anticorps suffisants à la protection – que ceux-ci soient directement protecteurs ou reflètent aussi le maintien de l’immunité cellulaire. Une immunité prolongée est observée après les maladies virales (hépatites A et B, rougeole, rubéole, oreillons, varicelle, encéphalite à tiques…), probablement par la persistance dans l’organisme d’antigènes viraux stimulant les cellules mémoires à se différencier en plasmocytes producteurs d’anticorps. Au contraire, les maladies bactériennes induisent une immunité qui n’est que transitoire (coqueluche, pneumocoques), voire absente (diphtérie, tétanos, méningites bactériennes chez le nourrisson) ou encore limitée à un seul sérotype/sérogroupe (pneumocoques, méningocoques). Il est donc indispensable de (re)vacciner après ces infections bactériennes !

J’ai vacciné hier un enfant de 5 mois 1/2 avec Infanrix® et Prévenar® (3ème dose de chaque). Il a déclaré la varicelle dans les heures qui ont suivi. Quelles sont les conséquences éventuelles ? Dois-je prévoir une 4ème dose avant le rappel prévu entre 16 et 18 mois ? Bien qu’il ne soit pas recommandé de vacciner en phase aiguë d’une maladie infectieuse et que la varicelle puisse induire un certain degré de dépression immunitaire, celle-ci est modérée et porte plus sur l’immunité cellulaire qu’humorale. Il n’est donc pas utile de proposer une dose supplémentaire. Il peut par contre être intéressant, au cas où l’immunogénicité aurait été partiellement diminuée, de prévoir le rappel de la 2e année dès l’âge de 16 mois.

Je souhaiterais connaître la conduite à tenir dans une situation de « retard de vaccination » : 1 adulte et 2 enfants ont reçu une seule dose de vaccin anti-Hépatite A (HavrixÒ), avant des vacances à l’étranger, il y a environ 4 à 6 ans. Faut-il recommencer toute la vaccination (2 injections) ? Une seule injection est-elle suffisante ? Une seule injection de rappel suffit. Il n’y a pas d’intervalle maximum en matière de vaccination, mais un nombre total d’injections à réaliser (« chaque dose compte »). L’immunogénicité d’un rappel tardif de vaccin hépatite A a fait l’objet de plusieurs études : la réponse après un rappel fait plus tardivement (24 à 66 mois) apparaît équivalente à celle observée quand celui-ci est fait 6 à 12 mois après la primovaccination [Landry P. Vaccine 2001; 19:399-402].

Robert Cohen, Pierre Bégué, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Daniel Floret, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Nicole Guérin, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°4 Avril 2005

  1. Pour votre information :

Dans sa séance du 18 mars, le CSHPF a approuvé le plan national d’élimination de la rougeole. Celui-ci prévoit des modifications concernant la vaccination qui devraient figurer au calendrier vaccinal 2005. Parmi ces mesures :

  • l’administration de la seconde dose de vaccin ROR est maintenant recommandée avant 2 ans, avec un intervalle d’au moins 1 mois après la première dose qui reste recommandée à 12 mois;
  • les nourrissons en crèche devraient recevoir une première dose de vaccin trivalent ROR à 9 mois, la seconde dose de ROR étant administrée entre 12 et 15 mois, sans nécessité de dose ultérieure;
  • un rattrapage vaccinal (total 2 doses de vaccin ROR) est recommandé aux enfants de 2 à 13 ans (donc nés à partir de 1992 et âgés de plus de 24 mois);
  • un rattrapage vaccinal (au moins 1 dose de vaccin trivalent ROR) est recommandé aux sujets de 14 à 25 ans

(donc nés entre 1980 et 1991).

Ces mesures ont pour but de diminuer le réservoir de sujets susceptibles, en particulier chez les jeunes enfants et les adolescents-jeunes adultes, dont le risque de complications de rougeole est particulièrement élevé. Le plan prévoit, en outre, une révision de la conduite à tenir autour des cas, y compris des mesures de vaccination en post-exposition.

Certains pédiatres s’étonnent de la disparition progressive de certains vaccins qu’ils utilisaient depuis de nombreuses années… Pour le DTP®, les lots fabriqués n’arrivaient plus à satisfaire aux contrôles effectués par l’Afssaps avant libération des produits : il est possible que ce vaccin puisse être à nouveau disponible dans les prochains mois. Par contre, le Monovax® ne répond plus aux conditions exigées par les agences d’enregistrement pour une bonne qualité

« pharmaceutique ». La qualité clinique des produits (efficacité, sécurité) n’est pas altérée, mais les industriels estiment que les efforts à consentir pour une remise aux normes seraient longs et coûteux. Sa production est donc interrompue.

Une revue de l’efficacité des vaccins anti-grippaux chez l’enfant sain a été publiée récemment [Jefferson, Lancet 2005; 365: 773]. Elle a analysé 14 études randomisées, 8 études de cohortes, une étude cas-témoins et une étude contrôlée au cours d’une épidémie. Chez l’enfant de plus de 2 ans, le vaccin vivant atténué (non disponible en Europe) a une efficacité de 79% alors que les vaccins tués ont une efficacité moindre (65%)Avant l’âge de 2 ans, l’efficacité des vaccins anti-grippaux chez l’enfant sain n’est pas démontrée. En effet, seulement deux études ont été réalisées chez des enfants de moins de 2 ans, études par ailleurs de qualité moyenne. Elles ne tiennent pas compte de la concordance du vaccin avec les souches circulantes, du nombre de dose recommandées selon l’âge et l’anamnèse vaccinale (primovaccination ou vaccination antérieure) ni du délai entre vaccination et exposition (l’efficacité de la vaccination contre la grippe n’étant maximale que pendant quelques mois). Cette étude ne remet donc pas en question la vaccination des nourrissons et jeunes enfants à risques mais elle souligne la nécessité de réalisation d’autres études avant d’éventuelles recommandations de vaccinations généralisées des enfants en bonne santé.

Vous avez été nombreux (plus de 800) à répondre à l’enquête sur la pratique du BCG. Résultats dès le prochain bulletin !

  1. Disponibilité des vaccins : Les difficultés d’approvisionnement se confirment pour le Pentacoq® et pour le

Monovax® (retrait du marché fin 2005).

  1. En réponse à vos questions : Pourriez-vous me communiquer les recommandations concernant le délai optimal post-natal de la sérovaccination anti-HBV à la naissance ? Quel est le délai à ne pas dépasser ?

Les immunoglobulines doivent être administrées le plus tôt possible (recommandées dans les 12 heures), mais peuvent rester efficaces jusqu’à 7 jours. Avant l’ère de la vaccination, il avait été démontré que l’efficacité des immunoglobulines chez les nouveaux-nés de mères HBsAg positives était de l’ordre de 75% lorsqu’elles étaient débutées dans les 48 heures après l’exposition. Le vaccin pratiqué dans les 3 premiers jours de vie a une efficacité estimée entre 85 et 95%. Là encore, l’administration doit être le plus précoce possible (recommandée dans les 24 heures) même s’il vaut mieux une vaccination tardive que pas de vaccination du tout. L’administration concomitante des immunoglobulines augmente l’efficacité de la vaccination. Les prématurés de moins de 2000 g ayant des réponses vaccinales moins efficaces, les immunoglobulines ont une importance encore accrue. Ainsi, l’Académie Américaine de Pédiatrie (Saari Pediatrics 2003 ;112 : 193) recommande pour les nouveaux-nés dont les mères sont HBsAg positives une vaccination et des immunoglobulines dans les 12 premières heures de vie. Pour les mères dont le statut HBsAg est inconnu, la vaccination est recommandée dans les mêmes délais, associée d’emblée aux immunoglobulines s’il s’agit d’un prématuré de moins de 2kg, une administration retardée étant considérée comme acceptable pour les autres enfants (attente des résultats de la sérologie maternelle jusqu’à 7 jours après l’accouchement). Les immunoglobulines doivent donc être données le plus tôt possible après la naissance jusqu’à 7 jours au plus tard, avec une efficacité qui s’amoindrit vraisemblablement lorsque le délai augmente. Il faut rappeler aussi que le schéma vaccinal 0, 1, 6 mois peut s’appliquer pour les plus de 2 kg, mais qu’une dose supplémentaire est recommandée pour les poids inférieurs (schéma 0, 1, 2-3, 6-7 mois).

Robert Cohen, Daniel Floret, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Pierre Bégué, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Jean Marc Garnier, Nicole Guérin, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°3 Mars 2005

  1. Pour votre information :Recrudescence de la coqueluche ! L’Institut de Veille Sanitaire signale une recrudescence significative des cas de coqueluche en France depuis septembre 2004 (invs.sante.fr/communication/index_cp.htm). On observe en effet une forte activité épidémique chez les adolescents et les adultes, en particulier en milieu hospitalier (personnel soignant). C’est l’occasion de rappeler les nouvelles mesures de prévention de la coqueluche autour des cas, récemment actualisées (février 2005) par le CSHPF (www.sante.gouv). Ce dernier recommande, outre la chimioprophylaxie par macrolide des sujets contacts, « la mise à jour des vaccinations selon le calendrier vaccinal pour les enfants et les adolescents ainsi que pour certains adultes. En l’absence actuelle de vaccin coquelucheux monovalent, force est de recourir à un vaccin combiné. Si l’enfant a reçu un vaccin DT Polio depuis moins de 5 ans, il est recommandé d’utiliser un vaccin combiné faiblement dosé en anatoxine diphtérique TdCaPolio et de surveiller la tolérance ». Le Repevax® (Sanofi Pasteur MSD) répond à cette définition et est disponible en officine. Le Boostrix® (GSK), qui a obtenu récemment une AMM , devrait l’être également d’ici quelques mois. Ces vaccins ont l’indication du rappel décennal chez l’adulte. Cette recommandation pourrait s’appliquer également aux adultes qui auraient reçu une dose de DTP depuis moins de 10 ans, étant donnée la formulation du dernier avis du CSHPF du 18 mars 2005 : « Faute de données, le CSHPF ne peut se prononcer sur un délai minimum à respecter par rapport à une vaccination tétanique, diphtérique ou poliomyélitique. Toutefois, dans le cas où la vaccination dTCaPolio serait réalisée avec un délai inférieur à 10 ans par rapport à la dernière vaccination tétanique diphtérique ou poliomyélitique, la littérature ne retrouve pas de données concernant d’éventuels effets délétères sévères ». L’absence de preuve n’est cependant pas la preuve de l’absence…

Protection contre les pneumocoques : Une étude récente [Cutts, Lancet 2005 ;365 :1139], randomisée en double aveugle et ayant inclus en Gambie plus de 17.000 patients, confirme l’efficacité d’un vaccin (77% [51-90]) pneumococcique conjugué 9 valents dans la prévention des infections invasives à pneumocoques dues aux sérotypes vaccinaux. Ce travail démontre un impact majeur en terme de santé publique dans les pays en voie de développement, où les pneumonies représentent la première cause de mortalité infantile : réduction toutes étiologies confondues des pneumonies radiologiques (37% [21-45]), des hospitalisations (15% [7-21]) et même de la mortalité infantile (6% [3- 28]). La question est : ce vaccin pourra-t-il être mis à la disposition des pays les plus pauvres ? La lente introduction du vaccin Hib dans ces pays n’incite malheureusement pas à l’optimisme…

Oreillons ou pas oreillons ? La survenue de parotidite chez des enfants pourtant vaccinés par le vaccin ROR n’est pas une situation rare… et fait souvent conclure à un échec de la vaccination contre les oreillons ! Une étude finlandaise récente [Davidkin J Infect Dis. 2005;191:719-23] ayant étudié 601 enfants et adolescents avec parotidite montre pourtant que le virus des oreillons n’est que rarement responsable, et qu’une autre étiologie virale a été retrouvée dans 14 % des cas : EBV, para-influenzae, adénovirus, HHV6…

La stratégie vaccinale contre la tuberculose a évolué ces dernières années (disparition du Monotest®, suppression des contrôles tuberculiniques et des revaccinations) et risque encore de se transformer les prochains mois (disparition du Monovax®, nouvelles recommandations en discussion…). Infovac-France vous proposera dans les prochains jours de participer à une enquête sur cette stratégie et ses évolutions possibles.

  1. Disponibilité des vaccins : Des difficultés de production et donc d’approvisionnement sont signalées pour le Pentacoq® et le Monovax®. Le Dukoral® (vaccin anti-choléra oral), actuellement seulement disponible dans les centres de vaccinations, sera en pharmacie à partir du mois de mai.
  2. En réponse à vos questions Existe-t-il une contre-indication aux vaccins contenant de l’aluminium chez une petite fille de 9 mois allergique aux protéines du lait de vache et dont le père aurait fait une myofasciite à macrophage ? Les contre-indications aux médicaments en général, et aux vaccins en particulier, sont déterminées par les agences d’enregistrement (AFSSAPS, Agence Européenne, Food and Drug Administration…). L’allergie aux protéines de lait de vache ne contre-indique aucun vaccin. Pour la myofasciite à macrophage, si l’OMS et l’AFSSAPS reconnaissent l’existence d’une lésion histologique spécifique secondaire à l’injection d’aluminium, il n’y a aucune démonstration que ce « tatouage vaccinal » histologique soit responsable d’un syndrome clinique spécifique. Aucune autorité de santé n’a donc contre-indiqué de vaccin pour les patients avec une biopsie de MMF positive – et a fortiori pour leur famille ! Une fausse contre-indication vaccinale serait lourde de conséquences pour cette enfant, la grande majorité des vaccins des nourrissons (hexavalents, pentavalents, hépatite b, Haemophilus, Prevenar®) utilisant l’aluminium comme adjuvant essentiel à leur efficacité.

Peut-t-on faire un Pentavalent acellulaire à un patient présentant une sclérose tubéreuse de Bourneville révélée par des convulsions à l’âge de 1 mois ? Ou est-il plutôt conseillé de ne pas le vacciner ? Les contre-indications neurologiques de la vaccination anti-coquelucheuse ont été reprécisées lors de l’AMM des vaccins hexavalent acellulaires : encéphalopathie d’étiologie inconnue, survenue dans les 7 jours suivant une vaccination antérieure par un vaccin contenant la valence coquelucheuse. La sclérose tubéreuse de Bourneville ne rentre pas dans ce cadre. De plus, plusieurs études montrent que les vaccins contenant la valence coquelucheuse (y compris les vaccins coquelucheux à germes entiers) ne constituent pas un facteur de risque d’aggravation de la maladie [Goodman Vaccine 1998;16 :225, Jozwiak Arch Neurol 1998;55:379]. La vaccination par un pentavalent ou un hexavalent acellulaire peut donc être proposée en prenant les précautions habituelles : dans une phase de stabilité sur le plan des convulsions, injection tôt dans la journée, traitement antipyrétique préventif.

Robert Cohen, Emmanuel Grimprel Pierre Bégué, Pascal Besse, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Daniel Floret, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Nicole Guérin, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°2 Février 2005

  1. Pour votre information :

Un numéro spécial (n°8) du BEH sur la varicelle fait par l’InVS a été publié le 22 Février 2005. Des données intéressantes y figurent : chaque année sont comptabilisés environ 550 à 750 mille cas, dont 4% avec complications, 1000 à 1300 hospitalisations et une vingtaine de décès. Néanmoins, certaines informations devraient être interprétées avec prudence :

  • Seulement 1/3 des varicelles hospitalisées le sont pour des complications de la maladie. Ceci est certainement dû, comme le soulignent les auteurs, à la méthode utilisée (exploitation des données du PMSI, qui n’est pas un outil de surveillance épidémiologique mais à visée économique). Dans l’observatoire des varicelles hospitalisées du GPIP (Grimprel, RICAI 2004) surveillant 150 services (environ 50 % des services hospitaliers français) sur une période de 18 mois, 1200 hospitalisations ont été rapportées, dont 80% pour des patients présentant des complications (50% d’entre elles étant d’origine infectieuse). Ces données nous paraissent plus fiables quant à la fréquence relative des complications chez les patients hospitalisés.
  • Le réseau sentinelle, qui a été utilisé pour les patients non hospitalisés, est constitué uniquement de généralistes. Vu la place des pédiatres dans la prise en charge des jeunes enfants, ceci sous-estime le nombre de varicelles, en particulier pour les plus jeunes enfants. De plus ce type de réseau n’est pas adapté à la mesure du taux de complications qui peuvent survenir après la consultation initiale. Enfin ne figurent pas le nombre de varicelles traitées par antiviraux et/ou
  • La varicelle chez la femme enceinte et le nouveau-né semble représenter, une cause mineure de mortalité. Mais à quel prix ? Nombre de sérologies demandées, anxiété générée, nombre de prescriptions d’anti-viraux, nombre d’hospitalisations… autant de marqueurs non relevés. Si la varicelle était une maladie aussi bénigne pendant la grossesse et la période de l’accouchement, il faudrait recommander de ne pas traiter systématiquement ces patients (femmes et nouveau-nés) par des antiviraux, ce qui est pourtant le cas actuellement…

Infovac-France, en collaboration avec l’InVS, ACTIV et les GROG, enverra très prochainement à ses abonnés un questionnaire concernant leur position sur la vaccination anti-varicelle.

La disparition prochaine du Monovax® suscite de nombreuses questions et inquiète nombre de vaccinateurs qui ne se sentent pas prêts à vacciner par un BCG intra-dermique les nouveau-nés et les nourrissons sans facteurs de risque. Une enquête Infovac-France sur la pratique actuelle et future de la vaccination contre la tuberculose est en préparation.

Une importante épidémie d’oreillons sévit actuellement en Grande-Bretagne, surtout chez les jeunes adultes et tout particulièrement dans les universités. Environ 5000 cas ont été déclarés pour le seul mois de janvier 2005 ! Cette épidémie s’explique par la présence d’une cohorte de jeunes adultes nés entre 1981 et 1989, peu vaccinés du fait de l’introduction de la vaccination ROR en 1988. De nombreux jeunes adultes de cette cohorte sont maintenant à l’université, situation favorable à la transmission du virus ourlien. L’office suisse des vaccinations recommande aux personnes envisageant de se rendre en Grande-Bretagne, tout particulièrement à celles devant fréquenter un établissement d’enseignement, d’être à jour de leur vaccination ROR. A notre connaissance, il n’y a pas de position officielle prise par le CTV ou le CSHPF.

Une étude de l’INVS (14/2/2005) avance le nombre de 300’000 adultes porteurs chroniques du virus de l’hépatite B en France (0,5 % de la population). Ce chiffre est 2 fois plus élevé que celui qui était estimé jusqu’à présent, près de 50% des sujets dépistés ne se sachant pas porteurs du virus! Ceci souligne l’importance de la recommandation de vaccination des tous les nourrissons et adolescents ainsi que les adultes appartenant à des groupes Ceci souligne l’importance de la vaccination des nourrissons, des adolescents et des adultes appartenant à des groupes à risques.

  1. Du coté des produits : L’agence Européenne a étendu l’AMM du Prevenar® aux patients de 2 à 5 Ceci permettra le rattrapage vaccinal des patients « à hauts risques » d’infections pneumococciques. Les difficultés d’approvisionnement se confirment pour le Pentacoq® et le Monovax® (retrait du marché prévu fin 2005).
  2. En réponse à vos questions : Pour éviter une éventuelle récidive de convulsion fébrile après vaccination ROR chez les enfants qui ont présenté des convulsions fébriles, faut-il prescrire un traitement antithermique préventif ? Plusieurs publications récentes suggèrent que les antipyrétiques prescrits pour des épisodes fébriles d’origine infectieuse n’ont pas d’efficacité dans la prévention des convulsions fébriles, probablement parce que celles-ci surviennent trop précocement et trop inopinément pour pouvoir être prévenues. Il n’y a pas d’étude démontrant l’efficacité des traitements antipyrétiques dans la prévention des convulsions post-vaccinales, mais plusieurs travaux démontrent que l’administration prophylactique d’anti-pyrétiques réduit la fréquence et l’intensité des états fébriles post-vaccinaux [IPP. Pediatr Infect Dis 1987;6:721, Lewis AJDC 1988;142:62]Les périodes à risques sont bien définies pour les vaccins coquelucheux (dans les 48h après l’injection) mais beaucoup plus larges après ROR (6 à 12 jours), rendant l’intérêt d’un traitement fébrifuge plus contraignant et plus aléatoire. La vaccination ROR augmente modérément le risque de convulsion fébrile (25-34 cas / 100.000, RR 2.83, CI95 :1.44 – 5.55) [Barlow NEJM 2001;345:656) entre 6 et 12 jours après vaccination. Un traitement antipyrétique préventif (paracétamol) durant cette période expose à peu d’effets indésirables et peut améliorer le confort de l’enfant, mais le plus important est d’expliquer aux parents que des antécédents de convulsions fébriles ne contre-indiquent aucune vaccination, que le risque de récidive est faible, que ces convulsions sont bénignes et quelle est enfin de leur donner la conduite à tenir en cas de survenue d’un épisode convulsif.

Robert Cohen, Daniel Floret, Emmanuel Grimprel, Pascal Besse, Nicole Guérin, Pierre Bégué, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Isabelle Hau, Philippe Reinert, Olivier Romain, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier, Claire-Anne Siegrist.


Bulletin n°1 Janvier 2005

  1. Pour votre information :

Un rapport récent de l’OMS, daté du 21 décembre 2004, fait le point de l’extension de la poliomyélite dans le monde. Si la maladie a été éradiquée d’Europe, d’Amériques, d’Océanie et d’Australie, des cas encore nombreux ont été rapportés dans différents pays d’Afrique (Nigeria, Soudan, République Centre Africaine, Niger…mais aussi Egypte) et d’Asie (Inde, Pakistan, Afghanistan) www.poplioeradication.org/content/fixed/casecount.shtml.

Quatre ans après le début du programme de vaccination en Angleterre, les données d’efficacité à moyen terme des vaccins conjugués contre le méningocoque C se précisent (Trotter CL, Lancet. 2004 24;364 (9431):365). Les adolescents ont été protégés à 95% pendant la première année, 92% par la suite. Les enfants vaccinés dès l’âge de 12 mois ont été protégés à 88% pendant la première année et encore à 61% dans les 3 ans suivants. Ceci met en évidence le rôle de la mémoire immunitaire : la protection est plus élevée que la proportion ayant des anticorps bactéricides circulants. Par contre, les nourrissons vaccinés à 2-3-4 mois ne sont protégés (93%) que pendant environ une année. Leur mémoire immunitaire pouvant être démontrée, cela suggère qu’elle ne se réactive pas suffisamment ou pas suffisamment rapidement… En Angleterre, une vaccination de rappel va donc être recommandée dans la 2e année de vie aux enfants vaccinés comme nourrissons et vers 10-11 ans chez les autres, pour les protéger pendant la 2e période à risque qu’est l’adolescence.

  1. Disponibilité des vaccins : La carence totale en DTPÒ devrait persister en 2005. Le Monotest® n’est plus disponible. Quelques difficultés d’approvisionnement sont signalées pour le Pentacoq® et le Monovax® (qui devrait être retiré du marché fin 2005).
  2. En réponse à vos questions : Un enfant de 4 ans est hospitalisé 6 jours après sa deuxième dose de vaccin rougeole-oreillons-rubéole pour un purpura thrombopénique idiopathique (PTI). La sérologie prélevée à l’entrée montre des IgG anti-rougeole positifs à 6182 mUI/l (seuil : 150) et des IgM négatifs. Peut-on éliminer le rôle du vaccin dans ce PTI ? Quel profil sérologique ferait la preuve du lien de causalité ? Le PTI est une des maladies auto-immunes les plus fréquentes chez l’enfant; fréquemment observé à la suite d’une infection virale, il n’est pas étonnant que des épisodes aient été rapportés après vaccination. C’est après l’administration de vaccins contenant la valence rougeoleuse que le phénomène est le mieux connu [Jadavji Pediatr Infect Dis J. 2003;22:119-22] : le risque de thrombopénie après R.O.R. est d’environ 1 sur 30.000 doses, un risque restant 10 fois moins élevé qu’après une rougeole ou une rubéole ! Le mécanisme est celui de l’induction croisée d’anticorps anti-plaquettes, déclenchée en parallèle aux réponses vaccinales. Pour cet enfant, le taux très élevé d’IgG seulement 6 jours après vaccination démontre l’existence de réponses anti-rougeole déjà à la première dose de R.O.R. Ces anticorps auront immédiatement neutralisé la composante rougeoleuse du vaccin, empêchant par la même toute réaction croisée – donc tout effet indésirable ! Plus de 95% des enfants répondant à la première dose de vaccin rubéole, celle-ci n’est sans doute pas non plus en cause. Elle pourrait être innocentée par la démonstration de taux élevés d’IgG à l’admission. Le PTI est très rare après les oreillons, et rarissime après vaccination (non observé en France après vaccin monovalent [Jonville-Bera AP, Pediatr Infect Dis J. 1996;15:44-8]. Il s’agit donc probablement d’une coïncidence

Un de mes patients, âgé de 5 mois, a présenté le soir du 3ème Infanrix quinta® une éruption de type érythème polymorphe (lésions de différents types, dont une cocarde, sur les membres et le visage) avec excellent état général. L’évolution a été favorable en quelques jours. Peut-on réaliser les prochains vaccins prévus par le calendrier vaccinal et notamment les rappels ? Les érythèmes polymorphes (EP) de l’enfant sont le plus souvent de cause infectieuse, plus rarement médicamenteuse. Les vaccinations font également partie des étiologies reconnues, un EP ayant été rapporté après administration de vaccins hépatite B, méningo C conjugué, R.O.R, ainsi que des vaccins contenant les valences diphtérique et tétanique [Di lernia V., Pediatr Dermatol 1994;11:36; Griffith, J Am Acad Dermatol 1998;19:758; Léauté-Labrèze, Arch Dis Child 2000;83347]. Dans le cas de cet enfant, l’absence de contexte infectieux (?) et de prise médicamenteuse (?) évoque une responsabilité du vaccin Infanrix quinta®, comme récemment été rapporté [Frederiksen MS, Scand J Infect Dis. 2004;36(2):154-5]. Le délai d’apparition est également compatible. Etant donné la forme mineure d’EP (absence de signes muqueux notamment) et le risque faible voire absent de récidive (récurrence décrite essentiellement avec l’herpès), les rappels/vaccinations ultérieurs pourront être effectués normalement.

Une fillette de moins de deux ans a présenté, lors de 3 vaccinations successives avec trois types de vaccins différents (PENTAVAC®, PREVENAR® et ENGERIX B10®), une très grosse réaction inflammatoire du membre inférieur, d’évolution spontanément favorable… Quel schéma adopter pour la suite des vaccinations ? L’enfant ayant bien toléré le vaccin rougeole-oreillons-rubéole, il s’agit probablement d’une forte réaction inflammatoire locale, associée à la présence d’aluminium. En effet, ces vaccins ont en commun la présence d’hydroxyde d’aluminium comme adjuvant. Ces réactions locales ne sont pas allergiques et ne contre-indiquent pas les injections suivantes. Cependant, les dosages des anticorps vaccinaux (en particulier pour le tétanos et l’hépatite B) pourraient permettre de limiter le nombre des vaccins au minimum nécessaire. De même, le Pneumo 23® qui ne contient pas d’aluminium peut être utilisé comme rappel pneumocoques après 18 mois.

Un nourrisson a reçu 4 injections d‘Infanrix quinta® en juillet, août, septembre et décembre 2003. Le rappel n’a pas été effectué. A quel moment dois-je le faire ? Bien que cet enfant aie reçu 4 doses de vaccin, la dernière injection ne peut être considérée comme un rappel (délai < 6 mois trop court pour la maturation de la mémoire immunitaire). Le plus simple est de faire son rappel à la date prévue, vers 18-24 mois. Certes, la réactogénicité risque d’être augmentée, mais cela lui permettra de revenir à un calendrier « normal ».

Robert Cohen, Marie-Aliette Dommergue, Olivier Romain, Nicole Guérin, Daniel Floret, Pierre Bégué, Pascal Besse, Véronique Dufour, Jean Marc Garnier, Joël Gaudelus, Emmanuel Grimprel, Isabelle Hau, Philippe Reinert, François Vié le Sage, Catherine Weil-Olivier Claire-Anne Siegrist.