Les vaccins AstraZeneca ou Johnson et Johnson augmentent-t-ils le risque de thrombose ? Ces vaccins ne sont pas associés à une augmentation globale du risque d’événements thromboemboliques notamment des phlébites et embolies pulmonaires qui en sont les deux manifestations les plus fréquentes, mais à un risque d’accidents thrombo-emboliques atypiques mais graves. En effet, plusieurs descriptions de malades présentant un syndrome caractérisé par des thromboses atypiques et une thrombopénie ont été rapportées une à trois semaines après la première dose du vaccin AstraZeneca ) (AZ) puis Johnson&Johnson (JJ). L’immense majorité des patients étaient en bonne santé et ne présentaient pas de facteur de risque connu. La plupart des patients étaient des femmes de moins de 50 ans, dont certaines recevaient des contraceptifs oraux. Ces thromboses atypiques touchaient des sites inhabituels, notamment les sinus veineux cérébraux (TVC), les veines splanchniques (TVS) hépatiques ou porte. Au moment du diagnostic, une thrombopénie nette (10 000 à 110 000/mm3) était retrouvée. De plus, des taux élevés de d-dimères et de faibles taux de fibrinogène étaient fréquents suggérant une consommation. L’association de thrombose et de thrombopénie a fait penser au tableau de thrombopénie induite par l’héparine (TIH) mais aucun des patients n’en avait reçu. Bien que la pathogénie de ce syndrome de thrombose-thrombopénie induite par la vaccination (TTIV) ne soit pas encore élucidée, certains résultats plaident pour un mécanisme proche du TIH. En effet, chez presque tous les patients, des taux élevés d’anticorps contre les complexes facteurs 4 (FP4) ont été retrouvés par ELISA et par des tests d’activation plaquettaire. Contrairement au TIH, la liaison des anticorps au FP4 s’est produite en l’absence d’héparine et la distribution des thromboses diffère clairement. Aucun signal n’avait été détecté lors des essais cliniques (comportant plusieurs dizaines de milliers de patients) et ayant conduit à l’approbation des vaccins AZ et JJ). L’Agence européenne des médicaments (l’Europe, qui a le plus utilisé le vaccin AZ et disposant d’un système de pharmacovigilance efficace) a répertorié 231 cas possibles (169 cas de TVC et 53 cas TVS) chez 34 millions de personnes ayant reçu le vaccin AZ soit une incidence < 1 cas pour 100 .000 vaccinés. Ce chiffre doit être considéré dans le contexte de l’incidence annuelle de la TVC dans la population générale (environ 1 cas pour 100 000 par an). Pour le vaccin JJ principalement utilisé aux Etats-Unis, le C.D.C. a retrouvé 28 cas sur près de 10 millions de vaccinés : l’immense majorité des cas (22/28) concernent des femmes, 18 d’entre elles avaient moins de 50 ans. Le risque global de développer un TTIV est extrêmement faible paraissant inférieur au vaccin AZ : 1/300.000 au global, environ 1 cas/100.000 chez les femmes âgées de 18 à 49 ans. Les informations disponibles suggèrent que les immunoglobulines IV et les glucocorticoïdes à fortes doses peuvent améliorer la thrombopénie en quelques jours et que l’utilisation d’autres anticoagulants que l’héparine est conseillée.
Ces observations soulèvent des questions importantes ayant des implications cliniques.
1) Quel(s) composant(s) du vaccin (séquences de l’adénovirus exprimées, spike ou autre composant) suscitent une réponse à une protéine hôte apparemment sans rapport, la PF4 ?
2) Quel est le risque après une re-vaccination ?
4) Les anticorps anti-VITT ressemblent t’ils aux anticorps anti-PF4 présents après une infection par le SRAS-CoV-2, qui ont été décrits chez des patients présentant une TIH ?
6) La distribution atypique des thromboses est-elle liée à la localisation de l’antigène ou à la réponse vasculaire ?
Il faut rappeler la très faible prévalence (1/100.000 à 1/1.000.000 en fonction de l’âge, du sexe et des vaccins) de cette complication de la vaccination, aussi sévère soit-elle, par rapport aux bénéfices de prévention de la Covid-19 (mortalité de 0,5 à 2 %) qui peut laisser des séquelles à long terme. Néanmoins, ces TTIV justifient d’être vigilant lorsque des patients présentent des symptômes neurologiques ou des abdominaux après l’administration d’un vaccin contre le SRAS-CoV-2.
Un algorithme de prise en charge (sous l’égide de SFNV, SFMV et GFHT) est disponible. Les signes qui doivent faire consulter : maux de tête, douleurs abdominales, nausées ou vomissements persistant plus de 3 jours ou s’intensifiant, troubles visuels, signes respiratoires ou purpura (https://ansm.sante.fr). L’OMS comme l’EMA ne remettent cependant pas en cause le rapport bénéfice/risque de ce vaccin. La France comme de nombreux pays européens maintenant, réserve l’utilisation du vaccin AZ ou J&J chez les personnes de 55 ans et plus. Il est recommandé aux personnes de moins de 55 ans ayant reçu une 1ère dose de vaccin AZ, de recevoir en rappel, un vaccin à ARNm. Bien qu’utilisant des technologies différentes, ces deux types de vaccin conduisent à la production de la même protéine, la protéine S, contre laquelle est dirigée la réponse immunitaire protégeant contre la Covid-19.